«Vic-en-Bigorre, chef-lieu de canton. - L’administration communale de Vic vendit
un ormeau qui était sur les limites des dizaines de Junquet, de Rotis et de Sillac.
Quelques habitants s’opposèrent à l’abattage de cet ormeau par procès-verbal du 5
janvier 1728 : « attendu que le dit arbre est de grande utilité dans tout le quartier
servant à divers usages des particuliers et du public et même pour se mettre bien
souvent à couvert lors du mauvais temps et servir de retraite lors des orages aux
chars de foin et de gerbes, et ce qui plus est pour servir de reposoir et de station
au Très-saint-Sacrement de l’autel à la Fête-Dieu et pour servir d’appui et de toit
à une croix qui avait été plantée ci devant et qui doit y être rétablie et finalement
pour servir d’ornement à tous les dits trois quartiers, dont le dit ormeau fait la
division et la séparation, comme aussi pour indiquer le chemin de Tarbes à tous ceux
qui vont dans la ville ou qui en reviennent pour aller à Tarbes. » - Larcher, Glanage,
XIX, 167. Dans certaines localités, il était dressé un procès-verbal de la cérémonie
de la plantation de l’arbre de la Liberté. Je n’ai rien trouvé sur la plantation
de l’arbre de la Liberté à Vic pendant la Révolution, cependant il y en avait un,
car l’affichage des documents de procédure avait lieu, en 1800, « à l’arbre de la
Liberté ».
Un voyageur qui passa à Vic en 1835 s’exprime ainsi sur un ormeau : « Vic a perdu
son ormeau : il est mort il y a quelques années, et elle annonçait, comme le prétendent
les habitants, une grande catastrophe : ils ont cru la reconnaître dans la Révolution
de juillet. Voici ce qu’on dit de cet ormeau, que l’on trouve encore dans la plupart
des villes de l’ancien royaume de Navarre ; A la naissance de Henri IV, on planta,
dans chaque commune, en signe de réjouissance, un ormeau. Cet arbre vit très longtemps,
il devrait perpétuer la mémoire de ce grand jour, qui donna pour maître à la France
un enfant de nos montagnes. La plupart de ces ormeaux de bonne nouvelle sont encore
debout. » Ce même voyageur, qui a conservé l’anonymat, ajoute en parlant de Vic,
sur le Sendrest : « Elle étale avec complaisance sa promenade des Cendriers, érables
d’environ un mètre, autour de laquelle coule un canal. » - Souvenirs d’un voyage
dans les Pyrénées p.141. Les platanes avaient, à cette époque deux ans de plantation,
la confusion d’essence était assez facile.
Un arbre de la Liberté fut planté en 1848 sur la place Marcadal et des mai devant
la maison des conseillers municipaux. Tous ces arbres furent abattus au 2 décembre
1851. Sur l’initiative de MM. Castain (Louis), Lestrade (Germain), dit Gilou, et
Masclet Jean, un arbre de la Liberté fut planté en 1878. Cet arbre mourut peu après.
La statue « La Revanche » en occupe l’emplacement. Deux ou trois ans après, une autre
plantation fut effectuée à l’angle du pont de l’Encan et de la place Gambetta ; ce
chêne, d’une belle venue, provient de la forêt du Marmajou. Un souvenir sanglant
s’attache à cet arbre. Le 12 juillet 1889, à la veille de la Fête Nationale, un jeune
charpentier, Cyprien Dallier, dit Rollin, grimpa dans l’arbre pour y attacher des
oriflammes. Par suite d’un faux mouvement ou d’un «étourdissement, il lâcha prise
et tomba sur la grille, terminée en fer de lance, entourant l’arbre. Il mourut sur
le coup (Archives de Vic, registre de l’Etat civil). Cette mort tragique consterna
la population.
Le projet de plantation du Sendrest et de la promenade du Nord, alors Allée des Minimes,
fut dressé en 1791, par Moinet, ingénieur départemental. Le Sendrest fut planté en
1793. Il comprend un érable et vingt-trois platanes, de grosseur variant de 3m40,
3m80, 3m90 et 4m02. Le plus beau se dresse vis-à-vis l’hôtel et mesure 4m à 1m du
sol. La promenade du Nord, composée de tilleuls dont le plus gros mesure 2m93, a
été plantée en 1794. Ces tilleuls remplacèrent des ormes fort beaux, car il y en
a qui atteignirent 200 livres lors de la vente publique qui en fut faite. Les platanes
du Foirail et de la promenade du Midi furent plantés en 1815 et 1816 ; aucun de ces
arbres n’atteint 3m. De circonférence. Les chênes de Dela L’Echez sont remplacés
par le « Promenade des Acacias », plantée vers 1824.
Au débouché de la rue Bertrand-Barère (anciennement rue Dieutal), sur la place du
Monde, au fond d’une impasse, s’élèvent deux pins parasol d’âges différents. Le plus
ancien mesurait 2m43 le 12 janvier 1914 ; très vivace, il serait âgé de plus de 80
ans, me dit le propriétaire M. Maximilien, dit Barrerou. Ce pin, ajoute-t-il, remplaça
un arbre de même essence, abattu il y a près de 75 ans, qui était gros comme une
barrique. Des ossements auraient été retrouvés non loin de cet arbre.
Les coteaux qui abritent Vic des vents d’ouest sont couverts des taillis du Temps-d’arré
et de Peyreblanque : c’est dans ce dernier bois que se trouve le chêne de la mort,
dont j’ai déjà parlé, ainsi que le chêne Macarèou, compris dans la coupe ; j’ai essayé
de sauver ce dernier : « Monsieur l’Inspecteur, s’il en est temps encore, je viens
attirer votre bienveillante attention sur le sort dont sont menacés deux chênes très
connus des chasseurs et des bûcherons vicquois ; ces chênes s’élèvent sur le coteau
de Peyreblanque. L’un d’eux, d’une végétation pénible, aux branches tourmentées et
touffues, a reçu un nom réaliste que l’on hésite à écrire même en gascon, quelque
latine que soit la langue. Théocrite ou Longue, Watteau ou Boucher, pourraient seuls
décrire et peindre les bucoliques et scènes galantes qu’il a abritées sous son épine
ramure, et qui lui ont valu son surnom. L’autre arbre a été dénommé « Le chêne de
la mort ». Il s’élève non loin du premier, à la croisée de plusieurs sentiers, et
marque un poste des plus meurtriers pour la chasse du lièvre ou du renard, lancé
par la meute. Ces deux arbres m’a-t-on dit, devraient être abattus au cours de la
coupe qu’on effectue actuellement. L’administration des Eaux et Forêts, soucieuse
de protéger les arbres intéressants à des titres divers, a prescrit des mesures spéciales
de conservation des sujets rentrant dans cette catégorie. Elle dit qu’ils feront
« l’objet d’une protection constante. On ne devra, sous aucun prétexte, les comprendre
dans les exploitations tant qu’ils donneront quelques signes de vitalité ». Or, si
le premier chêne, au surnom réaliste, est souffreteux, mais vivace encore, le second
paraît destiné à une longévité séculaire. Je vous en prie, Monsieur l’Inspecteur,
veuillez laisser vivre encore « le chêne de la mort » et faites en sorte que la cognée
du bûcheron ne terrasse pas « le cassou Macarèou », puisqu’il faut l’appeler par
son nom et que je ne trouve pas de synonyme assez sonore pour remplacer ce truculent
vocable. Les chasseurs et les bûcherons, ainsi que les amis du pittoresque et des
beautés sylvestres vous en seront reconnaissants. C’est dans ces sentiments que je
vous prie d’agréer mes respectueuses salutations. - N. Rosapelly. Vic-Bigorre, le
28 décembre 1918.
Sur le rapport d’un garde forestier, cet arbre, encore très vigoureux, très vivace,
a été déclaré dépérissant. Or, deux bûcherons ont travaillé toute une journée pour
en venir à bout et l’abattre. Cet acte de vandalisme n’est pas compensé par la conservation
d’un autre chêne voisin qui, lui aussi, devait être abattu.